L'agriculteur Paul François a estimé que sa troisième victoire remportée jeudi devant la justice contre la firme américaine Monsanto était un «message au gouvernement actuel», appelant les politiques à «prendre leurs responsabilités» sur l'utilisation des pesticides.
«Honte à eux ! Ils seront jugés par l'Histoire pour leur inaction», a déclaré à la presse à Paris l'agriculteur intoxiqué par le désherbant Lasso depuis interdit Il a notamment évoqué l'absence d'inscription dans la loi de l'interdiction du glyphosate, autre substance produite par la filiale de Bayer.
Emmanuel Macron «avait dit qu'il prendrait ses responsabilités pour une autre agriculture, pour retirer le glyphosate», mais «il ne l'a pas fait, donc maintenant on sait aussi pour qui il roule, il roule pour Bayer», a estimé le fondateur de l'association Phyto-victimes.
Il a aussi mis en cause la ministre de la Santé «Agnès Buzyn qui a tout fait pour empêcher la mise en place d'un fonds d'indemnisation que nous défendons depuis trois ans, honte à elle aussi! Car ces victimes demandent juste une réparation. »
«On va faire bouger les politiques, qui devront prendre leurs responsabilités pour une meilleure prévention et réparation», a-t-il dit, une «pensée pour les autres victimes, qui peinent à parler" de ce sujet "encore tabou».
«Il y aura un avant et un après», a assuré l'agriculteur, au bord des larmes, poussant un «grand ouf de soulagement" en cette «journée historique», et dénonçant 12 ans de «harcèlement» procédural mené par Monsanto, qui peut encore se pourvoir en cassation.
L'agriculteur charentais avait déjà obtenu gain de cause en première instance en 2012 et en appel en 2015, mais Monsanto s'était pourvu en cassation.
Pour Me François Lafforgue, son avocat, «c'est une grande victoire, un tournant dans la lutte des victimes de pesticides contre les firmes».
La justice a «retenu la responsabilité pleine et entière de Monsanto», a-t-il dit, relevant que l'entreprise est aussi condamnée à participer aux frais de justice du plaignant -- autre «signe que le travail engagé a été reconnu par la Cour d'appel».
Quant à la demande d'indemnisation (un million d'euros), la justice n'a pas statué encore : «Monsanto n'a pas répondu à nos arguments sur cette question (...) comme ça, ça retarde, c'est ce qu'on appelle une manoeuvre dilatoire : Monsanto continue sa stratégie de harcèlement judiciaire», a dit le conseil.