C’est peu dire que le premier tour des élections régionales a réservé des surprises. L’abstention, historique, explique-t-elle le décalage entre les sondages et le résultat des urnes ? « Il y a toujours des surprises dans une élection, rappelle Bernard Sananès. Et c’est normal, ce sont les électeurs qui ont le dernier mot ! On indiquait, la semaine précédente, que 36% des sondés se disaient sûrs d’aller voter et, visiblement, une part d’entre eux n’y est finalement pas allée. Les électeurs du Rassemblement national, comme les autres, se sont abstenus massivement. C’est cette abstention généralisée qui est frappante. Elle touche les jeunes, les cadres, les zones urbaines aussi bien que les zones rurales et même les seniors. »
Le vote protestataire est censé profiter d’une forte abstention. Ce qui n’a visiblement pas été le cas. « Le RN n’a pas réussi à mobiliser le vote de la colère, décrypte Bernard Sananès. Et c’est un enseignement majeur : la colère sociale, la colère liée à l’insécurité nous apparaissent très marquantes dans le pays. On pensait donc qu’elles s’exprimeraient et qu’elles seraient captées par le RN. Mais Marine Le Pen n’y est pas parvenue, ce qui pose trois questions : la colère a-t-elle diminué ? Je ne le crois pas, le sentiment d’injustice et d’insécurité reste très fort. La colère s’est-elle transformée en résignation ? Ou attend-elle tout simplement son heure… la présidentielle ? »
Concernant la situation du Rassemblement national dans la région Paca qu’il peut encore emporter, notre invité prévient : « Il y a parfois des corrections de tendance entre les deux tours, on peut s’attendre à ce que le RN mobilise dans la région où Mariani dispose d’une réserve de voix. L’appel à la mobilisation formulé par le parti de Marine Le Pen peut dégeler quelques abstentionnistes en Paca. Et on voit que Thierry Mariani, grâce à son profil, a réussi à capter une partie de l’électorat de droite ».
Quant à la déroute du parti de la majorité dimanche dernier, le président de l’institut Elabe analyse : « La marque Macron est peut-être solide, mais elle n’a qu’un seul produit. Et quand le produit n’est pas sur son étal, les candidats n’arrivent pas à transférer sur eux-mêmes la relative popularité du chef de l’Etat. Tout repose sur lui, son équipe gouvernementale n’imprime pas vraiment dans l’opinion, il est assez seul pour porter avec force le message politique. Cet échec pourrait remettre en cause l’attractivité politique du macronisme. Des personnalités de droite pourraient se demander si la marque Macron est toujours capable de les faire gagner. »
Â