FESTIVAL DE CANNES - Culte de l’apparence, matérialisme débridé et patriarcat: dans Sans filtre, qui vient d’obtenir la Palme d’or du Festival de Cannes 2022, le Suédois Ruben Östlund, fait voler en éclats les codes de la société moderne dans une satire jouissive. Avec pour décor, notamment, un yacht particulièrement mythique.
Dans le long métrage, Yaya, top model et influenceuse, obsédée par son image et sa carrière, se voit offrir une croisière de luxe avec son petit ami, Carl, lui aussi mannequin. A bord du bateau, ils côtoient une galerie de personnages richissimes – oligarques russes alcooliques, charmant couple de retraités britanniques ayant fait fortune dans la vente de mines antipersonnel et autres odieux passagers – qui harcèlent la cheffe de l’équipage de tous leurs caprices, tandis que cette dernière martyrise à son tour le petit personnel.
Mais une grosse tempête – dont ne se soucie guère le capitaine du bateau, un marxiste totalement ivre au moment crucial – va faire tanguer le navire et faire chavirer cet équilibre. Dans une sorte de Titanic inversé où, cette fois, les plus faibles ne sont pas forcément les perdants, Ruben Östlund décortique les ressorts de classe de fond en comble: les riches contre les pauvres, mais aussi les hommes contre les femmes, et les Blancs contre les Noirs.