Les travailleurs du port ont copieusement garni la grande salle du centre d’embauche des dockers. Et ce sont une mine et un ton graves qui sont affichés par leur porte-parole. En ce lundi matin, Frédéric Alpozzo, secrétaire général de l’union locale CGT du Grand port maritime de Marseille (GPMM), a convoqué la presse pour "faire passer des messages importants". Des messages en forme de ras-le-bol général sur le "déclassement" de la place du port dans la ville, mais également aux allures d’avertissement sur une future mobilisation au moment d’évoquer "les retards inacceptables" pris par le GPMM qui plomberaient l’activité industrielle de ce site.
"L’histoire de cette ville s’est faite avec le port et ses travailleurs. Il faut nous respecter, pose Frédéric Alpozzo. En juin dernier, le président de la République est venu promettre des milliards (11 milliards d’euros pour le développement du port, sa connexion à Lyon et au-delà, tout en gardant en tête les enjeux environnementaux, NDLR). Aujourd’hui, nous avons reçu son message 5/5 et les enjeux de son double discours. Où sont ces milliards pour moderniser notre activité ? L’arrogance se drape d’arguments écologiques, justification ultime pour expliquer la mort de nos bassins."
Premier des "points noirs" listés par les travailleurs du port : "le manque d’infrastructures permettant le fret roulant" (transport de remorques sur rails) sur les bassins Est. "Sur la décarbonation des quais comme sur les connexions ferroviaires, nous avons pris des retards inacceptables. Le port de Sète attire une grande partie de notre trafic historique grâce à près de 800 millions d’euros investis, notamment pour le fret roulant, embraye Ludovic Lomini, secrétaire général du syndicat CGT des dockers des bassins Est. Marseille devient un port de débordement et perd petit à petit sa position de premier port de Méditerranée."
Un sabordage qui serait orchestré sur l’autel du libéralisme selon la CGT, qui fédère l’écrasante majorité des travailleurs du GPMM. "La Méridionale vient d’annoncer la création d’une desserte vers la Corse depuis Toulon, ce qui va affaiblir la position de Marseille comme port de la continuité territoriale avec l’île, poursuit Frédéric Alpozzo. Pour tuer nos bassins, on ne s’y prendrait pas autrement. Les pouvoirs publics disent vouloir rendre une part du domaine public pour développer des activités touristiques, annoncent la création de data center… Mais plus de ville dans le port, c’est moins d’activité économique et industrielle."
Du côté du GPMM, on réfute toute intention de défavoriser les bassins Est et on met en avant "une année record pour le transport de passagers" sur le site. Avant de renvoyer aux dossiers de presse des "résultats 2023" qui présente "une croissance annuelle de 10,8 %" du chiffre d’affaires, et les "76M€ investis" durant la dernière année.